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Avec le grand public, faire reconnaitre les situations de traite par le travail

La traite par le travail se développe sur le terrain de la pauvreté et de la précarité.
Elle touche particulièrement les personnes en situation irrégulière et recrute ses victimes parmi les populations les plus vulnérables et défavorisées. Celles-ci sont prêtes à tout pour obtenir un emploi leur permettant de survivre et d’espérer de meilleures conditions de vie.

Dans ce contexte, les travailleurs sont entièrement dépendants de leur exploiteur. Ce dernier va profiter de cette situation pour exercer son emprise et réduire ses « employés » en esclavage.

A contrario d’un simple travail dissimulé et non déclaré, la traite par le travail se caractérise par la privation de liberté de ses victimes. Celles-ci sont souvent isolées socialement par leur « employeur » et menacées de représailles physiques ou psychologiques, de perdre leur travail, de ne pas être rémunéré ou d’être dénoncé aux autorités en raison de leur situation irrégulière…

Les victimes sont alors corvéables à merci et enfermées dans leur situation d’exploitation sans aucun recours ni possibilité de s’en extraire.

Une forme d’exploitation trop rarement reconnue

Un contexte d’exploitation complexe à prouver
En général, les victimes de traite par le travail ont adhéré au départ à la proposition d’ « emploi » de leur exploiteur car elles ont vu en elle un moyen d’accéder à de meilleures conditions de vie.

Mais une fois sous l’emprise de leur exploiteur, elles se retrouvent piégées dans ce système d’exploitation.

Seulement, pour les magistrats, il est encore difficile de reconnaitre le statut de victime à une personne qui a selon eux librement adhéré à sa situation d’exploitation. Ils ont alors tendance à ne pas prendre en compte les privations de liberté, les menaces, les violences et l’emprise subies par la personne.

Une politique migratoire défavorable aux sans-papiers
Reconnaitre le statut de victime de traite à une personne sans-papier régularise de fait sa situation administrative. Or, cette idée entre en opposition avec la politique migratoire actuelle en France qui est clairement restrictive.

Les autorités et les magistrats craignent que les migrants utilisent la traite comme un prétexte pour être régularisé et ont peur d’être envahit par ce type de demande.

Le levier de l’opinion publique

La mobilisation de l’opinion publique peut jouer un rôle important dans la prise en considération des situations de traite par le travail de la part des autorités et des magistrats.  

Pour ce qui est des juridictions et des magistrats, la mobilisation citoyenne fait appel à leur conscience professionnelle et les sensibilise à la gravité des situations de traite. Ils sont alors plus enclin à considérer le statut de victime des personnes exploitées et l’ensemble des préjudices qu’elles ont subies.

Pour les autorités administratives (préfecture notamment), la mobilisation citoyenne fait pression sur les élus. Ils ne veulent pas compromettre l’ordre social et sont sensibles à l’opinion publique. Quand celle-ci se mobilise en faveur des victimes de traite, elle a plus de poids et de crédibilité pour les autorités que les actions militantes d’une association, considérée comme partie prenante dans le débat.

Mobiliser le grand public et les médias sur les situations de traite par le travail

C’est en éveillant les consciences de la population et des élus au sein des villes, de la communauté des travailleurs ou des syndicats, sur la gravité des situations d’exploitation, que l’on peut faire émerger un mouvement citoyen en faveur des victimes de traite.

Dans cette prise de conscience, les médias peuvent jouer un rôle important. En s’emparant de ces sujets, ils leur donnent une légitimité auprès du grand public et des autorités tout en les sensibilisant au sort des victimes.

C’est pourquoi il est désormais primordial de mobiliser les citoyens et les médias autour des affaires judiciaires emblématiques de la traite par le travail.

L’OICEM : Organisation Internationale Contre l’Esclavage Moderne

Outre l’accompagnement de personnes victimes de traite exploitées en France et en Europe, l’OICEM développe depuis plusieurs années une assistance aux personnes mineures et majeures qui ont été victimes de traite, d’esclavage, de travail forcé, durant leur parcours migratoire. 
L’OICEM offre notamment un soutien psychologique spécialisé et vient en appui aux équipes professionnelles et bénévoles qui sont de plus en plus confrontées à des récits relatant ces faits de traite et d’esclavage.


Article écrit en collaboration avec Yann Prévost, président de l’OICEM.