Coordination : Geneviève Colas - genevieve.colas@secours-catholique.org - 06 71 00 69 90

L’avis de la CNCDH sur la lutte contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle et la prostitution des mineurs

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a adopté, le 15 avril dernier, l’avis relatif à la prévention et la lutte contre la prostitution des mineurs, la traite à des fins d’exploitation sexuelle des mineurs. Plusieurs associations du Collectif "Ensemble contre la traite des êtres humains" sont membres de la CNCDH : le Secours Catholique Caritas France, le Cofrade, la Voix de l'Enfant. D'autres associations du Collectif ont été auditionnées.

Ce sujet aussi difficile qu’essentiel s’inscrit dans le mandat de rapporteur national indépendant sur la lutte contre la traite des êtres humains qui a été confié par le gouvernement à la CNCDH depuis 2014. La CNCDH est, à ce titre, chargée de conseiller les pouvoirs publics mais aussi d’évaluer, en toute indépendance, la politique publique menée en France pour lutter contre ce fléau. Elle rend compte de ses analyses et recommandations à la Commission européenne, mais aussi au Conseil de l’Europe et aux Nations unies. 

Le choix de consacrer une analyse approfondie à cette thématique vise plus particulièrement à contribuer à la réflexion en cours, menée actuellement par Adrien Taquet, le Secrétaire d’état chargé de l’enfance et des familles. En formulant son diagnostic et une série de recommandations, la CNCDH cherche à peser sur les arbitrages politiques qui seront rendus. 

Par cet avis, la CNCDH entend insister sur l’importance d’adopter une approche par les droits, plutôt que par la seule entrée répressive, en considérant que le principe de prévention et de protection des enfants doit guider l’action publique. Il s’agit aussi de penser l’accès aux soins, et tous les autres droits impliqués.

La CNCDH souhaite aussi rappeler la nécessité de ne pas restreindre cette politique publique aux enfants français soumis à la prostitution.

Il est essentiel en effet de s’intéresser à tous les mineurs, et les mettre au cœur d’une politique ambitieuse de lutte contre la prostitution et de mener une campagne nationale de sensibilisation à ce phénomène.

Cette approche plus large est d’autant plus fondamentale que la politique répressive vis-à-vis des clients d’enfants livrés à la prostitution demeure très insuffisante. Sur ce volet, la CNCDH appelle à un sursaut de la politique pénale pour poursuivre systématiquement les auteurs dès lors que la connaissance, par le client, de l’état de minorité de l’enfant prostitué peut être établi. Mais pour cela, il ne faut pas être avare d’investigations. C’est de volontarisme politique dont nous avons besoin pour lutter contre l’impunité.

Au-delà, la CNCDH recommande d’améliorer les mécanismes d’identification des mineurs victimes par une meilleure prise en compte de la diversité et des causes du phénomène.

Il s’agit, à cette fin :

  • De favoriser la recherche, la collecte de données et la formation des agents,
  • De développer les cyberpatrouilles et la coopération avec les plateformes numériques. 

La CNCDH plaide pour la construction d’un lien de confiance avec les enfants livrés à la prostitution afin de permettre une prise en charge pérenne et globale.

C’est pourquoi, la CNCDH demande d’assurer l’inconditionnalité de la protection des mineurs victimes d’exploitation sexuelle, notamment par une mise à l’abri immédiate, la nomination d’un représentant légal et l’utilisation privilégiée des qualifications pénales les plus protectrices. 

La France s’est engagée, à travers ses Plans nationaux d’action, à mettre en œuvre une véritable politique publique de lutte contre la traite et l’exploitation.

Un réel effort doit être mené pour protéger les enfants victimes. Le dialogue avec la Miprof étant très ouvert, nous espérons que certaines de nos recommandations seront prises en compte. Mais il faut bien sûr aller au-delà pour inciter le gouvernement à un vrai changement d’échelle dans la politique qu’il mène. C’est pourquoi nous nous appuyons sur la société civile qui relaie nos positions et nous développons un plaidoyer à l’attention des instances internationales, afin que celles-ci fassent pression sur le gouvernement français. C’est en abordant le sujet sur tous les fronts que nous obtiendrons des avancées significatives.

La dimension internationale de notre action, en tant qu’Institution nationale des droits de l’homme accréditée auprès des Nations unies, est particulièrement stratégique dans le plaidoyer que nous menons.

Nous constatons que ce sujet, qui a pourtant une résonnance majeure pour les droits fondamentaux des victimes, est souvent peu porté politiquement en France. C’est d’autant plus surprenant que dans d’autres pays et pour les organisations internationales, l’intérêt politique et médiatique pour ces questions est énorme. C’est pour nous un levier d’influence de mobiliser la Commission européenne, l’OSCE, la Rapporteure spéciale des Nations unies en charge de cette question, ou encore le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite du Conseil de l’Europe (GRETA). Nous avons ainsi ouvert un dialogue sur ce sujet particulier avec nombre de nos interlocuteurs internationaux. 

L’appui des organisations internationales dans le dialogue que la CNCDH et la société civile avec le Gouvernement est souvent déterminant pour faire évoluer les choses. C’est la raison pour laquelle l’avis de la CNCDH a été traduit en anglais et transmis à nos interlocuteurs et partenaires internationaux.

Télécharger le communiqué de presse

Télécharger l'avis en Français

Télécharger l'avis en Anglais