Coordination : Geneviève Colas - genevieve.colas@secours-catholique.org - 06 71 00 69 90

Améliorer la protection des mineurs victimes de traite

Un protocole d’actions et d’engagement a été mis en place à Marseille dont la vocation est de mieux identifier, orienter, protéger et accompagner les mineurs victimes de traite.

Celui-ci a été conçu sous l’impulsion du tribunal judiciaire de Marseille. Il s’inscrit dans le prolongement du dispositif de mise à l’abri et d’éloignement des mineurs victimes de traite mis en place à Paris, destiné à favoriser l’adhésion des jeunes aux dispositifs d’accompagnement malgré la relation d’emprise de leur exploiteur qui pèse sur eux.

Un dispositif de protection créé à partir des observations « terrain »

L’ensemble des différents acteurs de Marseille, potentiellement en contact avec les mineurs victimes de traite, se sont réunis pour élaborer ce nouveau protocole : le tribunal de Marseille, les services de police et de gendarmerie, les services de la préfecture, le barreau de Marseille, les services de la protection de l’enfance du département, la protection judiciaire de la jeunesse, trois associations spécialisées dans l’accompagnement des victimes de traite et l’association d’aide aux victimes du territoire.

Pour créer un dispositif de protection qui soit effectif, coordonné et adapté au territoire de Marseille, chacun a fait part de ses observations « terrain » et des réalités rencontrées. Elles furent le point de départ de l’élaboration du protocole.

Un protocole visant une prise en charge globale et pluridisciplinaire du mineur

illustre


Il aborde la protection des victimes dans sa globalité, incluant une mise à l’abri et un accompagnement santé, psychologique, juridique, social et éducatif à travers l’accès à la scolarité ou à la formation.

C’est cette prise en charge pluridisciplinaire qui permet au mineur de se reconstruire, de se réinsérer et de former un nouveau projet de vie.

Cette approche est la seule qui puisse véritablement protéger le jeune face aux dangers de l’exploitation.

L’idée est donc de développer un dispositif de protection impliquant des acteurs formés et coordonnés pour accompagner efficacement et dans la globalité les mineurs victimes de traite.

Les singularités du dispositif

Pour adapter ce protocole aux réalités rencontrées à Marseille, il a été décidé de l’ouvrir à l’ensemble des formes de traite : exploitation sexuelle, contrainte à commettre des délits, mendicité forcée, servitude domestique…  
En outre, ce dispositif n’est pas réservé aux situations nécessitant un éloignement géographique. Il peut être appliqué dans le cadre d’une mise à l’abri du jeune sur le territoire si cette solution est suffisamment sécurisée pour eux.  

Améliorer l’identification des victimes

illustre


Pour améliorer l’identification des mineurs victimes de traite, le protocole a mis à disposition de l’ensemble des acteurs au contact des potentielles victimes (Police, Associations, lieux de soins, Aide Sociale à l’Enfance…) une fiche de liaison permettant de recueillir l’ensemble des indicateurs de traite pour une situation rencontrée. Cet outil a été élaboré par l’OICEM au cours de son expérience auprès des victimes de traite.

> Télécharger la fiche de liaison

C’est un formulaire de premier accueil qui permet d’obtenir les éléments qui vont appuyer l’identification et de guider la rencontre avec un jeune potentiellement victime de traite.

Institutionnaliser la coordination interacteurs

De nombreux acteurs interviennent auprès d’un mineur victime de traite. Chacun a un rôle particulier : prise en charge santé, accompagnement social, soutien dans la procédure juridique, défense devant la justice, responsables de l’enquête…

Tous ces organismes ont un objectif commun : la protection des mineurs et la lutte contre la traite et les auteurs qui la pratiquent. Mais sans coordination entre eux, l’accompagnement de la victime est morcelé, inefficace et souvent incohérent.

C’est pourquoi le protocole prévoit un répertoire recensant l’ensemble des organismes en lien avec les victimes de traite en précisant le rôle de chacun. Ainsi, chaque acteur est en mesure de se coordonner avec les autres et d’orienter les mineurs auprès des structures adaptées en fonction de sa situation et de ses besoins.

L’idée est que la coordination soit effective dès les premiers contacts avec une victime, afin que celle-ci bénéficie de l’expertise de tous dès le début de son parcours.

Le protocole formalise et institutionnalise la coordination des acteurs tout au long du parcours du jeune, c’est-à-dire avant, pendant et après sa mise à l’abri. Il prévoit ainsi le partage d’informations entre les organismes, dans le cadre du secret partagé et du respect de la confidentialité et de la protection des données personnelles.

Des acteurs formés et informés sur la traite

Le protocole inclut la formation des acteurs sur la traite et les besoins spécifiques des victimes, effectuée par les associations spécialisées. Celles-ci s’engagent également à soutenir les professionnels qui souhaitent bénéficier de leur expertise pour mieux appréhender les situations préoccupantes auxquelles ils sont confrontés. Ainsi, les associations peuvent participer aux réunions d’équipes des acteurs pour les conseiller sur des cas précis.

Ces dispositions permettent de maintenir les acteurs informés sur la traite et ses évolutions, d’améliorer l’expertise de chacun et d’appuyer la collaboration entre les différentes structures gravitant autour des mineurs victimes de traite.

Un protocole en constante évolution

Une instance est chargée du suivi de la mise en œuvre du protocole afin de le faire vivre et évoluer en fonction des problématiques rencontrées. Cette disposition permet aux acteurs de Marseille d’avoir un regard d’ensemble sur la traite et ses mécanismes, sur son évolution et sur les situations des victimes mineures.

Cet aperçu global permet aux acteurs de penser ensemble les solutions destinées à  améliorer la protection des victimes et la lutte contre la traite.

 

L’OICEM Organisation Internationale Contre l’Esclavage Moderne

Outre l’accompagnement de personnes victimes de traite exploitées en France et en Europe, l’OICEM développe depuis plusieurs années une assistance aux personnes mineures et majeures qui ont été victimes de traite, d’esclavage, de travail forcé, durant leur parcours migratoire. 
L’OICEM offre notamment un soutien psychologique spécialisé et vient en appui aux équipes professionnelles et bénévoles qui sont de plus en plus confrontées à des récits relatant ces faits de traite et d’esclavage.


Article écrit en collaboration avec Nagham Hriech Wahabi, psychologue clinicienne et directrice de l’OICEM