Pour une personne victime de traite atteinte d’une maladie incurable, aborder sa fin de vie en paix est un véritable défi. Souvent déracinées de leur terre d’origine, séparées de leur entourage familial, traumatisées par les violences subies lors de l’exploitation, et touchées par un sentiment de culpabilité lié à leur parcours, un soutien profond est utile pour soigner ces blessures et vivre ses derniers instants plus sereinement.
L’association « Aux Captifs la libération », a mis en place un accompagnement spécialisé destiné aux personnes en fin de vie. Il a pour but de leur permettre de vivre au mieux leurs derniers jours, en paix avec elles-mêmes, dans la dignité et le respect qui leur est dû. Quand ce soutien s’adresse à des personnes victimes de traite, il doit prendre en considération leur vécu traumatique et les spécificités de leur parcours afin d’y apporter des réponses adaptées.
Pour ces personnes, la reconnaissance de leur statut de victime peut être d’un grand secours afin de les aider à se sentir en paix avec leur histoire.
Pour qu’il soit bénéfique, l’accompagnement des personnes victimes de traite en fin de vie doit prendre en compte l’ensemble des dimensions de l’individu, de son vécu et de son parcours.
Favoriser l’adhésion des personnes à leur prise en charge médicale
Les personnes victimes de traite, pour la plupart étrangères, méconnaissent le système médical français et ne comprennent pas toujours l’intérêt des soins proposés. Il peut donc y avoir des interruptions de traitements ou des ruptures avec le milieu médical, en raison notamment de divergences culturelles.
C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en place un suivi pédagogique de la personne, en lien avec l’équipe médicale, destiné à favoriser l’adhésion de la personne aux soins physiques et psychologiques proposés, indispensables à la préservation de leur état de santé.
Il s’agit essentiellement de les accompagner dans la compréhension de la pathologie et de la prise en charge médicale, afin qu’elles puissent en saisir les intérêts pour elles-mêmes et s’y inscrire dans la continuité.
Un cadre de vie adapté à l’état de santé des personnes
Pour les personnes victimes de traite en fin de vie, il s’agit de trouver un lieu de vie adapté à leur état de santé, leur permettant de bénéficier d’un soutien spécifique pour les aider à vivre ce qu’elles traversent.
Si certains centres d’hébergement d’urgence spécialisés peuvent être des solutions à court terme, les appartements de coordination thérapeutiques sont particulièrement adaptés à ces situations sur le plus long terme.
La personne accueillie y est entourée d’une équipe médicale et sociale pour l’accompagner au quotidien, avec une vraie disponibilité pour la personne et la façon dont elle vit sa situation.
Réconcilier la personne avec son histoire pour avancer en paix
Les personnes étrangères victimes de traite ont souvent été arrachées à leur terre et à leurs origines. Elles ont été séparées de leur famille, fréquemment restée au pays. Un accompagnement spécifique destiné à les aider à rétablir ces liens familiaux peut s’avérer d’un grand secours pour soigner certaines blessures affectives et les soulager du poids de leur passé.
Le fait de renouer avec sa famille, à condition qu’elle ne soit pas toxique, peut jouer un rôle essentiel dans la réconciliation de la personne avec son histoire, afin de lui permettre d’aborder plus sereinement le reste de sa vie.
Continuer à vivre
Les personnes en fin de vie, affaiblies par la maladie et privées de perspectives à long terme, peuvent avoir tendance à s’isoler et vivre cette étape de leur vie dans la solitude.
Pourtant, malgré leur situation, elles ont encore des choses à vivre.
Il s’agit alors de les encourager à entretenir une vie sociale, à travers divers ateliers ou activités, leur permettant de tisser des liens positifs, de passer des moments agréables en collectivité, de conserver une ouverture sur le monde et de pouvoir profiter simplement du temps qui leur est imparti.
Cet accompagnement peut prendre la forme d’ateliers collectifs d’échange et de partage, d’activités artistiques ou sportives adaptées à leur état de santé, de sorties culturelles ou de loisirs… dans le simple but de les inciter à conserver des liens sociaux, de passer des moments de vie agréables en groupe ou de partager leur vécu avec d’autres.
Soutenir la personne dans sa dimension spirituelle
Il est également essentiel de prendre en considération la dimension spirituelle de la personne, quelques soient ses croyances ou sa religion.
Aux captifs, la libération
Créée en 1981, l’association Aux captifs, la libération est une association catholique de bénévoles et de professionnels, dont la mission est d’aller dans la rue, vers les personnes en très grande précarité, sans logement ou en situation de prostitution. Chaque semaine, « Les Captifs » réalisent 45 maraudes à la rencontre des personnes en situation de rue ou/et d’exploitation sexuelle ou de prostitution, parfois victimes de traite des êtres humains, à Paris. Elle a aussi des équipes bénévoles à Bordeaux, Bourges, Brest, Lyon et Nîmes.
Le cœur de sa mission est d’aller à la rencontre des personnes sur leur lieu de vie et ou d’exploitation, quelles que soient leurs origines et leurs croyances, et de les accompagner pour les aider à trouver des chemins de libération, qui peuvent ales conduire jusqu’à la sortie de la prostitution.
Les équipes de bénévoles et de salariés ont développé une expertise dans la rencontre, l’identification, l’accueil et l’accompagnement des personnes.
L’association propose également des permanences d’accueil et un accompagnement global à travers accompagnement social, accès au soin et au droit grâce à un maillage associatif adapté.
Les propositions de l’association visent à favoriser la liberté de choix des personnes dans leurs parcours. L'association déploie des activités de mobilisation /dynamisation ainsi que des séjours de rupture, comme autant de leviers de reconstruction vers une capacité à exercer sa liberté voire une insertion.
L’identification spécifique des victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle, mineures et majeures, est une des priorités de l’association ; tout comme la sensibilisation des pouvoirs publics et de la société aux problématiques liées à la traite des êtres humains.
L’association est agréée depuis 2017 par l’Etat pour accompagner des parcours de sortie de prostitution et de traite à des fins d’exploitation sexuelle.
Article écrit en collaboration avec Charlotte Sarah de l'association Aux captifs la libération.